Le Conseil d’Etat, par deux arrêts récents (Conseil d’Etat, 26 juin 2019, n°412429 et Conseil d’Etat, 22 juillet 2020 n°426139) est venu développer sa jurisprudence, selon laquelle, si l’autorité compétente peut assortir une autorisation d’urbanisme de prescriptions remédiant aux risques que présente une construction pour la sécurité ou la salubrité publique, elle ne doit pas opposer au pétitionnaire un rejet de sa demande (Conseil d’Etat, 9 juillet 2010, n°304463).
L’article R.111-2 du Code de l’urbanisme dispose en effet que : « Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ». Il convient de relever dans cet article la formule « peut être » pouvant laisser penser que l’autorité compétente disposait d’un choix entre refuser ou délivrer le permis de construire en l’assortissant d’une prescription.
Néanmoins, en vertu de cet article, issu du règlement national d’urbanisme (RNU), la haute juridiction administrative a clairement posé, dans son arrêt du 26 juin 2019, le principe suivant : « lorsqu’un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l’autorité compétence estime, sous le contrôle du juge, qu’il n’est pas légalement possible, au vu du dossier et de l’instruction de la demande de permis, d’accorder le permis en l’assortissant de prescriptions spéciales, qui, sans apporter au projet de modification substantielle nécessitant la présentation d’une nouvelle demande, permettraient d’assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires (...) ».
En d’autres termes, si l’autorité, chargée de délivrer le permis de construire est face à un projet susceptible de porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique –dans le cas de l’arrêt, un projet situé dans un secteur soumis à des risques d’incendie- elle doit, avant de refuser ce projet, vérifier si des prescriptions permettent de rendre le projet conforme au droit de l’urbanisme. Une double condition s’attache alors à ces prescriptions :
Par ailleurs, il convient de souligner que, pour apprécier la conformité d’un permis de construire aux dispositions d’un PLU, il convient de tenir compte des prescriptions qui l’assortissent (Conseil d’Etat, 9e et 10e ch, 5 juillet 2021, n°437849).
Dans son arrêt du 22 juillet 2020, le Conseil d’Etat reprend sensiblement le même raisonnement en affirmant que « (…) ce n’est que dans le cas où l’autorité compétente estime, au vu d’une appréciation concrète de l’ensemble des caractéristiques de la situation d’espèce qui lui est soumise et du projet pour lequel l’autorisation de construire est sollicitée, y compris d’éléments déjà connus lors de l’élaboration du plan de prévention des risques natures, qu’il n’est pas légalement possible d’accorder le permis en l’assortissant de prescriptions permettant d’assurer la conformité de la construction aux dispositions de l’article R.111-2 du code de l’urbanisme, qu’elle peut refuser, pour ce motif, de délivrer le permis ».
Ainsi, il ressort nettement de ces arrêts que la décision de refus de permis de construire ne constitue qu’un ultime recours pour l’autorité compétente : si le projet est susceptible de porter atteinte à la sécurité ou salubrité publique (ou à d’autres dispositions d’urbanisme d’ailleurs), doivent être analysées les différentes possibilités de prescriptions pouvant assortir le permis de construire, sous réserve qu’elles ne nécessitent pas la présentation d’un nouveau projet. Ce n’est que si aucune prescription ne peut rendre le projet conforme au droit de l’urbanisme que le refus d’autorisation s’imposera.
Ronan BLANQUET
AVOCAT
Aurélia MICHINOT
JURISTE
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